L’INSTITUTIONNALISATION DE LA FANTAISIE
Associations d’Artistes
L’UAM (L’Union des Artistes Modernes) regroupait plusieurs artistes, architectes, créateurs qui s’opposaient à l’académisme dans leurs domaines de création. Peu importent le résultat, la fonction de l’objet ou même les matières utilisées. On passe des sièges en tube d’acier de René Herbst aux tissages artisanaux d’Hélène Henry. Puis on s’arrête sur les bijoux en métaux précieux de Raymond Templier et les meubles « bon marché » de Francis Jourdain. Il n’y a pourtant pas de lien franc, qu’il soit intellectuel ou technique entre ces quelques œuvres. Par contre, ces individus sont liés par une même volonté : utiliser des matériaux nouveaux et intégrer les formes du monde industriel.
Et ce sont bien les bijoutiers de l’UAM qui, en préférant utiliser l’argent plutôt que l’or, feront prévaloir l’innovation formelle et conceptuelle sur la valeur intrinsèque du bijou. Trente ans après sa création, le groupe se dissout. On accuse parfois le concept même de l’UAM, trop vaste pour être contenu. Ou peut-être a-t-il apporté trop de confusion aux contemporains, qui n’étaient pas encore près à recevoir ces idées. Cette association fut peut-être la première à comprendre que les matières utilisées n’ont pas de rapport avec la recherche artistique de l’objet.
En 1982, un petit groupe d’artistes et autres bijoutiers créateurs se constitue sous le nom d’Héphaïstos. Il s’agit d’une association française fondée par cinq créateurs de bijoux dont Catherine Noll.
Quelques années plus tôt, en 1976, c’est Gilles Jonemann qui fonde les ateliers de Font Blanche, près de Nîmes.
- Collier composé de perles en jade, de galets en cristal de roche et jade gravés. Fermoir en cristal de roche. Catherine Noll, 1980.
- Bracelet Chat, Collection de Février 1989. Cuir, noix de coco et métal. Gilles Jonemann.
Ces deux groupes, indépendants de tout académisme, répondent en fait à une demande. Plus tellement sur le plan conceptuel voire intellectuel de l’UAM, mais sur le plan technique. Les créateurs libres d’esprit sont de plus en plus nombreux, mais ont besoin de référence, de méthode.
Et L’Enseignement ?
En dehors de l’instruction du métier d’orfèvre joaillier, il est difficile d’apprendre les techniques de fabrication, ou l’Histoire de la bijouterie fantaisie qui permettrait à l’apprenti d’avoir des références stylistiques.
Ceci dit, les enseignements du bijou dans sa généralité, ne sont pas non plus très nombreux. Il existe l’AFEDAP Paris, l’école des Arts Décoratifs de Strasbourg, en choisissant une filière précise, l’école technique privée de la bijouterie-joaillerie (la HBJO) et enfin l’institut de Bijouterie de Saumur. Cependant, on remarque que cette discipline est souvent suivie dès la fin du collège à travers une formation professionnelle, comme le CAP, le BEP ou autre Bac Pro. Pour les jeunes créateurs désireux d’avoir un diplôme reconnu mais pas dans un objectif d’artisanat ou d’ouvrier, il n’y a pas de demi-mesure.
Jean-Yves le Mignot, président de la Triennale de Bijou, tente une explication lors de la troisième triennale du bijou. « La France est avant tout un pays qui a une tradition dans le domaine de la joaillerie, une tradition doublée d’un grand savoir-faire. La conséquence directe de ce phénomène est que les écoles orientent leur formation dans ce sens et cherchent avant tout à fournir de bons techniciens pour la joaillerie au détriment de la création. Ce qui manque en France, ce sont des formations de troisième cycle pour la création de bijoux ».
Pourtant, aujourd’hui encore, « ces formations de troisième cycle » où la créativité plutôt que la technique serait mise en valeur, n’existent pas. Il est possible que le non enseignement du bijou fantaisie dévalorise ce métier, aux yeux de la clientèle certes, mais aussi aux yeux du créateur qui aurait besoin d’une approbation vis-à-vis d’une autorité compétente en ce domaine .